[JECO 2020] Quand les banques parlent de monnaies numériques

[JECO 2020] Quand les banques parlent de monnaies numériques

Monnaie digitale, le nouveau Graal ?

Lors des Journées de l’économie (JECO) de novembre 2020, une conférence en partenariat avec la Banque de France a eu lieu, nommée « Monnaie digitale, le nouveau Graal ? ». En tant qu’intervenant, il y avait :

  • Maya ATIG : Directrice générale de la Fédération Bancaire Française (FBF)
  • Nathalie AUFAUVRE : Directrice générale de la Stabilité Financière et des Opérations de la Banque de France
  • Benoit COEURÉ : Chef du Pôle Innovation, Membre du Comité de direction de la Banque des Règlements Internationaux (BRI)
  • François-Louis MICHAUD : Directeur général, Autorité Bancaire Européenne (ABE)
  • Joëlle TOLEDANO : Professeure émérite, associée à la Chaire Gouvernance & Regulation, Université Paris Dauphine
  • Marc-Olivier STRAUSS-KAHN : Modérateur, chargé de cours – ESCP – ESSEC – Science Po

Nous avons jugé intéressant d’écouter ce que des intervenants venant du secteur financier pensent de la monnaie numérique.

Un manque d’impartialité pour un débat pertinent

Dès les premières minutes de présentation, l’ambiance est clairement annoncée :

Les cryptoactifs, tel le Bitcoin, qui n’est pas une monnaie, qui n’est pas même une cryptomonnaie. Non seulement il est d’une origine privée, mais sa valeur est purement spéculative, ne s’appuie sur aucun élément intrinsèque, si ce n’est sa rareté, et cette rareté (21 millions d’unités), fait que c’est difficilement diffusable à très grande échelle.

Les auditeurs sont donc placés tout de suite dans une ambiance anti-Bitcoin et cryptoactifs, ce qui va forcément bloquer une grande partie des auditeurs qui sont généralement attachés au Bitcoin. Une mauvaise entrée en la matière pour des gens qui prétendaient vouloir rendre accessible leur conférence et le sujet dans son ensemble. Surtout qu’on nous dévoile durant la conférence que le président de séance déclare en coulisse que le Bitcoin est quelque chose dont la valeur varie et est destiné à des gens qui veulent se faire de l’argent rapidement, que ce n’est pas très « propre ». L’impartialité n’est pas présente, ce qui est dommage pour engager un débat.

La peur des monnaies privées

Les plus sensibles d’entre nous auraient déjà stoppé la conférence ici, chez CryptoMS, nous avons voulu voir jusqu’où cette conférence allait descendre. Les intervenants ont mis en avant l’importance du projet Libra. Libra a pour eux mis la lumière sur les monnaies émises par des sociétés privées, ce qui a fait peur aux banques et les a, en quelque sorte, obligés à s’intéresser aux monnaies numériques.

Les intervenants semblent d’ailleurs être bien plus effrayés par la possibilité de voir des monnaies privées émises pas des GAFA que par les monnaies d’autres pays. Nathalie AUFAUVRE pense même que sortir une MDBC (Monnaie Digitale de Banque Centrale) en premier, comme le fait la Chine, n’est absolument pas déterminant et ne permettra pas d’obtenir des avantages particuliers. Elle a le même avis sur le secteur privé qui est en avance.

D’autres intervenants sont semble-t-il, moins catégoriques sur ce point. Ils acquiescent cependant tous qu’actuellement les propositions faites par les acteurs privés sont meilleures, surtout au niveau de l’expérience utilisateur. Benoit COEURÉ semble avoir la volonté de proposer un service basé sur l’utilisation, faire un produit utile et surtout qui soit utilisable facilement tel que pourrait le proposer des acteurs privés.

Le contraste est d’ailleurs assez étonnant de voir une partie des intervenants relativement inquiets sur le retard européen, alors qu’une autre partie semble complètement relâchée sur le sujet. Benoit COEURÉ met tout de même en avant le fait que les pays émergents sont plus avancés que la France sur le sujet, en prenant comme exemple les Bahamas, pays dans lequel c’est un véritable besoin de par la structure géographique du pays.

Des banques centrales en retard face à la concurrence ?

Les intervenants mettent en avant les problèmes et risques par rapport à l’identification des transactions et la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme, en plus du règlement MICA. Ils leur semblent évidents que de nouvelles règlementations vont être mises en place. Benoit COEURÉ met tout de même en avant les libertés des individus et la protection des données personnelles ; il ne semble pas vouloir de normes plus dures que celles déjà mises en place.

Cette conférence n’a fait que mettre en évidence les distensions entre les acteurs du secteur financier ; nous avons donc des acteurs européens et des professeurs bien plus enclins à l’innovation et qui craignant un retard de l’Europe, et dans un même temps, des acteurs contre le progrès et complètement sereins sur l’avenir.

De notre côté, nous retiendrons les propos de Joëlle TOLEDANO (Professeure en Sciences économiques, associée à la Chaire «Gouvernance et Régulation» de l’Université Paris-Dauphine) :

Le numérique va s’attaquer au système en place avec des solutions innovantes, élégantes et moins couteuses pour les gens. Le secteur bancaire va préserver ses rentes quitte après à faire sa révolution. Penser que l’innovation n’est pas que dans les banques me parait évident.

La rediffusion de la conférence est disponible.

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Marvin
Marvin Diplômé de Master CCA, Auditeur/Collaborateur Comptable, passionné d'économie et de Crypto-économie